Il y a quelques semaines, des Parisiens ont interpellé sur la tenue de simulacres de corrida aux Arènes de Lutèce – amphithéâtre gallo-romain construit au IIe siècle à destination de spectacles de gladiateurs. Ce monument classé se trouve dans le 5e arrondissement de Paris, à proximité du Panthéon. La mairie du 5e arrondissement a été saisie afin d’alerter sur la promotion en public d’une pratique délictuelle sur 99 % du territoire français – dont Paris. La mairie du 5e a pris le dossier au sérieux. De façon concomitante au signalement, une manifestation a été organisée par One Voice et le CRAC Europe et une pétition a été mise en ligne. Ce n’est pas la première fois que le CRAC Europe intervient à Paris, toujours aux Arènes de Lutèce, pour dénoncer cette promotion active sur la voie publique. Les pro-corrida qui se targuent de respecter la loi ne semblent visiblement pas dans les clous cette fois-ci. Nous rappelons que la corrida s’est imposée en France aux termes de 100 ans de troubles à l’ordre public de la part des aficionados. La loi paraît n’être respectée que lorsqu’elle est conforme à leurs caprices.
Nous avons informé Douchka Markovic – élue pour le Parti animaliste à la Ville de Paris – de ces simulacres de corrida aux Arènes de Lutèce. Pour répondre à ce prosélytisme dans la capitale, un vœu qui sera soumis au Conseil de Paris programmé les 8, 9, 10 et 11 avril 2025 a été rédigé. Ce texte, porté par Douchka Markovic, Chloé Sagaspe, Aminata Niakité et Fatomata Koné avec le groupe Les Écologistes, demande aux Conseillers municipaux de la Ville de Paris de bien vouloir :
déclarer Paris ville anti-corrida, à l’instar d’autres villes en France, en Espagne et dans des pays d’Amérique latine,
exhorter le gouvernement et les parlementaires à adopter une loi pour unifier l’interdiction de la corrida sur l’ensemble du territoire français.
Les Conseillers municipaux concernés ont été interpellés en ce sens par Ensemble pour l’abolition. Nous restons attentifs aux suites qui seront données à ce vœu.
En novembre 2022, la proposition de loi abolitionniste initiée par le Député Aymeric Caron a suscité une levée de bouclier tant de la part des aficionados que de la part des politiques. On a dénoncé une attaque insupportable envers les traditions françaises et pire, une volonté de mettre fin à la ruralité. Dans le sud de la France, un grand rassemblement s’est tenu pour montrer que le petit monde de la corrida était grand par ses adeptes. A ce moment-là, nous avions dénoncé cette mystification, notamment au regard des acteurs des tauromachies landaises et camarguaises1 qui s’étaient joints à cette manifestation. S’il est juste d’arguer que les traditions tauromachiques françaises sont bien implantées dans les régions du sud, il n’en est pas de même pour la tauromachie espagnole.
A la suite du retrait de la proposition de loi d’Aymeric Caron, le mundillo2 s’était réjoui de la publicité occasionnée à cette pratique, assurant que les arènes n’avaient jamais connu ni un tel intérêt de la part du public ni un tel engouement à la défendre de la part de ses thuriféraires. Prudents, nous étions restés en retrait de ces allégations puisqu’en l’espèce, le recul sur plusieurs années nous semblait de mise. Cette réserve était un gage d’honnêteté : nul ne pouvait prédire si oui ou non, la corrida en sortirait renforcée. Plus de deux années se sont écoulées et nous pouvons désormais affirmer de façon rigoureuse, au regard des chiffres et des témoignages des aficionados3 eux-mêmes, que la corrida est en chute libre.
Eauze, La Brède et Vieux Boucau, trois communes situées dans le Sud-Ouest ont annoncé par voie de presse leur renoncement à programmer des corridas. Les motivations sont diverses : considérations éthiques, préoccupations financières ou encore reconnaissance de la désaffection du public. Quelles que soient les raisons, l’arrêt des corridas est toujours un évènement positif. Cependant, loin d’être marginal – il se murmure que le trio pourrait bien être rejoint par d’autres municipalités – ce phénomène mérite notre analyse. C’est un cri de détresse qui se fait entendre sur France Bleu dans son émission« Callejon » du 1er février 20254. La méthode Coué est dénoncée : la corrida est moribonde et craint la « curée », elle ne peut tenir que grâce aux financements publics ; clamer haut et fort le contraire n’arrêtera pas cette agonie. Les Français n’accepteraient pas des subventions à la corrida, y compris dans les communes où elle sévit. Nous n’avons de cesse de rappeler : 80 % des Français (tous sondages confondus) veulent voir son abolition. Pourtant, une commune qui organise des corridas injecte de facto de l’argent public à cette pratique ; en outre, les municipalités perçoivent des dotations de l’Etat. L’auto-financement est impossible puisque les arènes ne sont pas remplies. Il reste les financements privés, peu convaincants tant il faudrait de mécènes pour la maintenir.
Le maintien de la corrida par voie de mécénat ne résoudrait pas la désaffection pour les arènes. Sur une soixantaine de corridas organisées en France, seulement 10 % d’entre elles auraient affiché complet5. Les « No Hay Billetes !6 » qui se font entendre bruyamment dès lors qu’une arène est pleine n’est qu’un évènement isolé, un écran de fumée qui cache mal une débâcle globale. Le CRAC Europe l’affirme depuis longtemps : les arènes ne se remplissent que grâce aux mêmes personnes d’un même secteur géographique. Or, les aficonados ne se déplacent plus. On devine la suite : depuis le sable de l’arène, on ne voit des gradins que béton ou planches en bois, c’est selon l’architecture de l’édifice.
La fumée se dissipant enfin, on entrevoit la préoccupation des élus en place et des futurs édiles : garder ou conquérir leur siège aux municipales de 2026 – c’est le jeu politique. Pour ce faire, puisque nous sommes en démocratie, il convient de servir les administrés et non pas ses intérêts ou ceux des lobbys. C’est là le devoir d’un maire. On comprend dès lors qu’afficher son amour pour la corrida ne fera pas recette. La faute en revient donc aux électeurs, notamment « les nouveaux arrivants », les « retraités », les « bobos »7 qui envahissent les petites communes. Nous soulignons seulement que la lutte contre la désertification des campagnes est un sujet national et qu’aucun maire ne déplorera que sa commune soit attractive. Cette attractivité est source de richesse économique, elle. Pudiquement, il est évoqué un « changement de mentalité » et un anti-taurinisme d’atmosphère » que nous pourrions traduire par une évolution des mentalités qui conduit à rejeter la souffrance animale, surtout lorsqu’elle est infligée sciemment et sans autre projet qu’elle-même. Car c’est ainsi que le grand public voit la corrida.
Le cas de Vieux-Boucau mérite que l’on s’y attarde. Cette commune a organisé des corridas à l’occasion de l’anniversaire de la peña locale, il y a deux ans. L’évènement a vu les arènes se remplir. Puis se vider en 2024, ce qui a conduit l’équipe municipale, par ailleurs peu favorable à la corrida, à siffler l’arrêt de la récréation pour 2025. Sur France Bleu8, on se lamente et l’on admet que c’est difficile « a fortiori si la tradition locale n’est pas profondément ancrée ». Le voile de fumée n’en finit plus de se déchirer : tout le sud ne serait donc pas profondément attaché à la corrida ? C’est pourtant ce qui nous est vendu depuis des décennies. Mais alors, que reste-t-il comme argument ? La victimisation. En effet, « les aficionados, eux, ne demandent jamais rien9 » : quoi de plus logique puisque jusqu’à aujourd’hui, tout leur a été accordé sans même qu’ils aient besoin de réclamer.
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